Le Nigeria franchit un nouveau cap dans la régulation des actifs numériques en octroyant des licences provisoires à deux plateformes d’échange de cryptomonnaies, Quidax et Busha, par la Securities and Exchange Commission (SEC). Cette décision, prise une semaine après l’annonce de cette intention par le régulateur, marque un tournant dans l’approche du pays envers ce secteur en pleine expansion.
Après l’interdiction totale des transactions crypto par les banques en 2021, les autorités nigérianes ont progressivement assoupli leur position. En décembre 2023, la Banque centrale a franchi une étape importante en autorisant les banques à ouvrir des comptes pour les fournisseurs de services en cryptomonnaies (VASPs).
« Les approbations de principe délivrées constituent une étape préalable à l’enregistrement complet par la SEC. Elles visent à assurer la protection et la transparence appropriées pour chaque produit ou service », a précisé la SEC dans un communiqué. Ces deux entreprises opéreront sous le régime du programme Accelerated Regulatory Incubation Program (ARIP), lancé en juillet 2024. Ce programme a été conçu pour encadrer les plateformes ayant démarré leurs activités avant l’adoption des règles sur les fournisseurs de services d’actifs virtuels en mai 2022.
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Cette nouvelle orientation intervient après des mois d’incertitudes et de spéculations concernant la position des autorités nigérianes sur les cryptomonnaies. Depuis février 2024, le secteur fait l’objet d’une surveillance accrue, les autorités reprochant au trading de pair à pair (P2P) de contribuer à la volatilité du naira, qui s’est effondré face au dollar depuis juin 2022. Il est important de noter que la dévaluation du naira a poussé de nombreux Nigérians à se tourner vers les cryptomonnaies comme alternative financière.
Le directeur général de la SEC, Emomotimi Agama, a précisé que le programme ARIP permettra au régulateur de mieux comprendre les opérations des start-ups et de définir des règles claires pour encadrer leurs activités.
Le Nigeria reste l’un des leaders mondiaux en termes d’adoption de cryptomonnaies. En 2023, il a été classé numéro un parmi 155 pays pour le volume des transactions P2P en cryptomonnaies, surpassant tous les autres. Environ 33,4 % des Nigérians étaient impliqués dans les transactions de crypto. Entre juillet 2023 et juin 2024, le volume des transactions en crypto dans le pays a atteint 56,7 milliards de dollars, soit une augmentation de 9 % par rapport à la période précédente.
Cette régulation arrive dans un contexte où la plus grande plateforme mondiale, Binance, fait face à des accusations de blanchiment d’argent au Nigeria, avec un cadre de l’entreprise détenu.
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Selon la Banque centrale, 26 milliards de dollars de transactions non traçables auraient été traitées par Binance, soulignant l’urgence d’un cadre réglementaire robuste pour sécuriser les transactions et stabiliser le marché des changes.
SUZANNE BATISTA
Source : Agence Ecofin/Communiqué SEC